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Du côté de l’Union européenne

Le scandale provoqué par les retards de livraison d’AstraZeneca a soulevé beaucoup de questions concernant la vaccination en Europe et le rôle des institutions européennes dans la négociation de l’achat des doses. La Commission a-t-elle vraiment fait son maximum? L’Europe est-elle réellement crédible?

Avant toute chose, il faut savoir que l’Union européenne (UE) ne peut rien faire sans base légale. Il s’agit d’une construction politique inédite qui fonctionne grâce aux traités établis par les États membres et dans lesquels sont réparties les compétences. Celles-ci y sont divisées en trois catégories: la première est dite "exclusive", ce qui signifie que l’Union a la main totale dans ces domaines (pour l’euro, par exemple). La seconde est celle des compétences partagées. Comme son nom l’indique, les États et Bruxelles se partagent le pouvoir de décision (exemple: les politiques environnementales). La dernière, et c’est celle qui nous intéresse le plus, regroupe les compétences propres aux États. Dans ce domaine, l’Union ne peut rien faire ou décider. Cela concerne notamment la santé publique (Art.168, TFEU).

Dans cette optique, l’Union ne pouvait intervenir qu’en soutien aux décisions prises par les pays membres et tenter de coordonner les actions. C’est la Commission qui a endossé ce rôle de coordinateur avec Thierry Breton (le commissaire au marché intérieur) comme représentant. Le manque de préparation a entrainé des erreurs, qui ont été largement pointées par les observateurs. Mais il convient également de rappeler que si les États avaient dû faire ce travail individuellement, les plus petits pays auraient été plus fortement pénalisés.

Mais comment avons-nous choisi les firmes avec lesquelles traiter? Et pourquoi ne pas avoir recours aux vaccins russes et chinois? Dans son travail, la Commission a été assistée par l’Agence européenne du médicament (AEM), chargée de valider les vaccins. Les firmes qui ont réagi (et investi) le plus rapidement ont donc été les premières à être autorisées en Europe. Mais la validation est aussi soumise au principe de précaution, élément fort de la culture européenne que Thierry Breton n’a pas manqué de renforcer. C’est notamment sur base de ce principe que les vaccins russes et chinois n’ont pas encore été utilisés sur le sol européen; ceux-ci étant toujours en cours de validation.

Toutefois, au-delà de l’aspect sanitaire, il semble important de rappeler que le vaccin représente un enjeu géopolitique important. La Russie entend bien exporter plus de vaccins qu’elle n’en garde pour sa consommation intérieure. La solidarité européenne est également en jeu et les moyens financiers sont disponibles pour venir en aide aux pays membres qui en feraient la demande. Il est ici question du Mécanisme européen de stabilité qui octroie des prêts de plusieurs milliards d’euros à des taux ultra compétitifs. Toutefois, aucun État n’y a encore eu recours jusqu’à présent dans cette crise.

Enfin, notons que sans vaccination dans les pays les plus défavorisés ou sans solidarité internationale, on prend le risque de faire perdurer la pandémie et d’accentuer la méfiance à l’égard des immigrés provenant de pays moins privilégiés.