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Comprendre, questionner, débattre

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Le conflit, la nature de l'Homme ?

Regards croisés
  • Pauline Xiao
  • Sheredhan Moutaber
Temps de lecture : 3 min.

L’Homme est-il bon ou mauvais pour vouloir la guerre ? Et puis d’abord: pourquoi la guerre ? Ces questions ont toutes un jour traversé notre esprit.

Valérie Piette et Thomas Berns, respectivement historienne et philosophe politique en Faculté de Philosophie et Sciences sociales, nous éclairent sur la violence par une enquête sur la nature de l'Homme et son rapport au monde.

L’homme est-il naturellement enclin à faire la guerre ?

Valérie Piette

Je ne pense pas que la nature humaine ait quelque chose à faire là-dedans, mais bien que c’est le résultat de facteurs historiques. La guerre fait partie de nos sociétés depuis la nuit des temps : aller chercher chez l’autre ce que nous n’avons pas, défendre un territoire, ça a toujours existé.

Thomas Berns

Personnellement, je raisonne rarement en termes de nature humaine. Je crois plus intéressant le questionnement sur les manières et processus par lesquels se construisent des subjectivités politiques et individuelles.

La question de la nature humaine est scientifiquement “inintéressante”. Même résolue, elle mène à d’autres questions. Si l’Homme est naturellement bon/mauvais, comment expliquer que certains individus expriment cette nature et d’autres pas ? Nous ne comprenons toujours pas comment certains hommes font la guerre et d’autres la condamnent... Au bout du compte, le questionnement sur les conditions historiques par lesquelles se construisent la paix et la guerre est inévitable pour comprendre ce qui pousse les individus à vouloir user de la violence.

Le “processus de subjectivation” est plus pertinent comme objet d’étude. Ni la paix, ni la guerre ne devraient être perçues de manière naturelle.

Le “choix méthodologique" du professeur Berns encourage “le questionnement des conditions (en philosophie) ou des causes (historiques) par lesquelles se construisent la paix et la guerre”

Les intérêts: source de conflits ?

Thomas Berns

Il faut penser une nature humaine qui serait naturellement conflictuelle pour construire une légitimité de l'État. Autrement dit, pour donner du poids à l'État, il faut justifier la nature de la guerre. C’est ce que relate la pensée hobbesienne sur l’Etat et la légitimité politique.

L'intérêt peut causer la guerre, mais également apaiser les instincts guerriers comme le prouve le libéralisme. Cette théorie du marché démontre que, hors des institutions, l'humain peut être pacifique. Certaines formes d’intérêts peuvent donc nourrir la fabrication d’une paix.

Valérie Piette

Derrière certains actes d’apparence progressiste - qu’on penserait donc plus enclins à la paix - peuvent se cacher des raisons bien plus cyniques.

Citons le cas de la presse britannique qui avait, à l’époque de la colonisation du Congo, dénoncé les actions du Roi Léopold II. Ce n’est pas anodin que ce soient les Anglais qui sortent ce type d’informations. Ils ont pris conscience de la richesse de l’État indépendant du congo : ils veulent être califes à la place du calife.

Tantôt ingrédients de la paix, tantôt de la guerre, les intérêts basculent donc d’un camp à l’autre. Tout dépend du système économique et/ou politique pensé.

D'ennemi à ami. Quel est l’impact de la pensée et du jugement dans le réel ?

Thomas Berns

La propagande de guerre consiste à dépeindre l’autre comme “l’horreur absolue”. On l'a vu, par exemple, pendant la guerre de 14-18 et encore plus lors de la guerre 40- 45.

Elle va jouer un rôle déterminant pour faire systématiquement croire que cette guerre était juste et morale parce que l’opinion du public va compter de plus en plus. La Première Guerre mondiale ne peut s’appeler mondiale que parce qu’on a réussi à faire se battre entre eux des peuples opprimés.

Le philosophe Emmanuel Kant s’est intéressé aux conditions de possibilité de la paix. Le principe d’hospitalité universelle constitue l’une d’entre elles. L'hospitalité signifie le droit d'accueillir un étranger sans le traiter comme un ennemi.

Selon Kant, ce serait un principe transcendantal, c’est-à-dire qui s’applique à l’ensemble des peuples et qui ouvrirait la voie à une communauté pacifique. Ainsi, Kant pense que, pour parvenir à la paix, il faut mettre en place des normes qui permettent aux différentes nations et cultures de vivre ensemble, en bonne entente.

Peut-on voir la guerre comme quelque chose d’indispensable à la paix ? Peut-on voir l’histoire de nos civilisations humaines comme une alternance de paix et de guerres ?

Thomas Berns

Il faut danser à 3 ou à 4 pour que la théorie cyclique devienne intéressante.

La paix et la guerre ne sont pas reliées de manière cyclique. La paix n'est pas l'absence de guerre, mais elle inclut un rapport de mise à distance avec elle.

Prenons l'exemple de l'Europe: elle a connu une longue période de paix mais ce n’est pas pour autant qu'elle n'a pas eu de rôle dans des guerres à l'extérieur. L’Europe a fait la guerre hors de chez elle de manière à avoir une “violence entretenue sous le visage de la paix.”

La guerre elle-même a évolué et s'est déplacée à distance, en passant d’une violence au corps à corps à l'usage de drones. La paix peut donc s'analyser comme un exercice de mise à distance de la guerre.

Finalement, qu’est-ce que la paix ? Comment l'expliqueriez-vous à un enfant ?

Thomas Berns

La paix ne se définit qu’en actes et se conceptualise difficilement en dehors des contextes.

Pour expliquer ce qu’est la paix à un enfant, Thomas Berns insisterait sur le contexte et les conditions qui rendent la paix possible.

Valérie Piette

Professeure d'histoire contemporaine à l'ULB - Faculté de Philosophie et Sciences sociales

Thomas Berns

Professeur de philosophie politique à l'ULB - Faculté des Philosophie et Sciences sociales

Université Libre de Bruxelles

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