Sur base de l’expertise de Jasper Van Assche, professeur et chercheur en psychologie sociale et politique, Faculté de Psychologie, Sciences de l’Education et Logopédie.
L’extrémisme politique, de quoi parle-t-on ?
Malgré les différents débats parmi les chercheur.ses en psychologie politique, le professeur Van Assche nous explique qu’en de simples termes, on peut définir l’extrémisme politique comme une opinion extrême. La plupart des idées en politique se situent dans le centre, alors qu’une partie d’entre elles se situent aux extrêmes.
Au fil des élections, on observe une montée en popularité des extrêmes. Sur cela, le professeur explique : « ce n'est pas lié au fait qu’il y ait des personnes qui deviennent de plus en plus extrême dans leur définition de leur orientation politique. Selon moi, il y a des thématiques qui ont été négligées par exemple ou maltraitées par les partis traditionnels qui sont capturées par les partis extrêmes ».
L’influence de l’agenda des partis extrêmes se fait ressentir sur les partis traditionnels. Le professeur Van Assche se référant à une étude menée par l’université d’Anvers explique que des partis comme le CD&V (le parti chrétien démocrate flamand) ou encore le Vooruit (le parti socialiste flamand) se positionnent plus à droite par rapport aux dernières élections de 2019 sur des questions telles que le traitement des nouveaux arrivants en Belgique.
Qu’en est-il du cynisme politique ?
Il est vrai qu’une distinction gauche-droite nous permet de voir plus clair en politique, une politique de gauche est généralement admise comme étant plus progressiste alors qu’une politique de droite est qualifiée de conservatrice. Mais encore faut-il savoir distinguer la variable socio-culturel de la variable économique. Ainsi, le professeur Van Assche nous explique qu’un.e électeur.ice.s peut se définir à la fois à gauche sur les questions socio-culturelles, en soutenant par exemple la lutte contre les discriminations raciales et sexuelles, et d’autre part, à droite sur les questions économiques, soutenant par exemple une réduction des dépenses sociales.
De plus, le professeur Van Assche nous informe que les partisan.ne.s des partis des extrêmes ne se situent pas forcément, idéologiquement, sur les extrêmes de l’axe gauche-droite. Autrement dit, les électeur.ice.s du PTB (Parti Travailliste Belge, parti d’extrême gauche) par exemple, ne se situent pas le plus à gauche idéologiquement. Sur base de données du Belgian National Election Study (BNES) datant de 2019, elles révèlent que les électeur.ice.s du PVDA, Groen, PS, sp.a se positionnent plus à gauche que celleux du PTB1.
Quand il s’agit d’analyser le comportement des électeur.ice.s donc, le plus pertinent n’est donc sans doute pas situer les idées politiques qu’iels soutiennent sur une échelle allant d’extrême gauche à extrême droite, mais de se pencher plutôt sur le cynisme politique. Ce dernier peut être défini comme une méfiance à l’égard des élites politiques et est caractéristiques des supporters des partis d’extrême. Le professeur Van Assche explique que la désocialisation est un facteur important expliquant le cynisme politique et est lié à une baisse de soutien pour la démocratie. Les supporters d’un parti d’extrême montrent une fidélité et une identification plus forte pour leur parti. En conséquence, leurs votes ont moins tendance à changer alors que le supports des électeurs de partis traditionnels changent plus facilement d’un parti à un autre.
Pour autant les motivations qui mènent des citoyens à soutenir des partis d’extrême gauche ou d’extrême droits sont bien différentes, le premier groupe attirent des électeur.ice.s ayant une aversion pour le capitalisme alors que le second attirent celleux hostile à la migration. Il est aussi intéressant de noter que l’offre politique dans une région n’est pas le reflet des opinions politiques de sa population. Par exemple, malgré le soutien important de l’extrême droite en Flandre et une absence d’offre politique de ce registre en Wallonie, de récentes études montrent qu’il n’y a pas de différence fondamentale entre l’attitudes de la population wallonne et flamande vis-à-vis du racisme et du sexisme.
Face à la montée des extrêmes en Belgique, il est important de ne pas se contenter de la dichotomie gauche-droite. Le professeur Jasper Van Assche souligne que cette montée n'est pas simplement le résultat d'un virage idéologique des électeurs, mais plutôt d'un cynisme politique croissant et d'une désillusion face aux partis traditionnels.