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Entendre, rêver, se mobiliser

À quoi ressemblera la mobilisation citoyenne demain? Nous avons discuté avec Martin Deleixhe, enseignant-chercheur en sciences politiques à l’ULB et spécialisé en théorie politique. Il nous a apporté des pistes de réponses et surtout de réflexion.

Aujourd’hui, les initiatives citoyennes se multiplient et viennent remettre en question le fonctionnement de nos structures démocratiques. Les citoyens se mobilisent sur des thématiques très particulières avec des revendications diverses et variées. Cependant, cette mobilisation croissante peut parfois contraster avec un désengagement des citoyens dans différents processus démocratiques. Citons par exemple, le cas de la France et son taux d’abstention record de presque 67 % aux élections régionales de 2021.   

Pour Martin Deleixhe, enseignant-chercheur en sciences politiques à l’ULB, ce constat n’est pas forcément paradoxal. Selon lui, les partis politiques font face actuellement à une crise identitaire. Nos structures partisanes et nos représentants doivent se réinventer dès aujourd’hui pour proposer demain des visions du monde qui rassemblent des revendications multiples. Il s’agit là d’un travail conséquent qui demande d’être à l’écoute des différentes mobilisations citoyennes, afin d’essayer de structurer des idées qui puissent répondre aux diverses attentes. C’est dans ce chantier que réside peut-être la clé de voute de nos sociétés de demain. 

Libres d’imaginer nos sociétés de demain 

Faute de boule de cristal, les spécialistes ne peuvent que s’appuyer sur les faits du passé et du présent, « mais qu’en est-t-il de demain ? ». Par le prisme de nos opinions et de nos vécus, nous sommes toutes et tous libres d’imaginer nos sociétés de demain.  

L’essor des technologies de l’information et des réseaux sociaux va incontestablement jouer un rôle déterminant. Mais est-ce que ces outils seront au service d’une e-démocratie inclusive et transparente? Une démocratie où les représentants seraient directement au contact des citoyens et de leurs revendications, par le biais d’échanges plus directs ? Un système politique plus accessible où chacun aurait la liberté et la possibilité de s’impliquer? Et enfin, une sphère publique où tout le monde prendrait le temps de débattre, d’écouter, puis enfin de décider ensemble et de voter en toute sérénité ?  

On est en droit de rêver mais malheureusement, ces outils pourraient servir une tout autre réalité… Une réalité où l’ère de la raison laisserait place à la dictature de l’émotion. Où le sensationnel ferait loi, nous faisant oublier les bienfaits du débat. Dans cette nouvelle sphère publique, nous serions obligés de réagir, de nous positionner sur tout, et tout de suite. Plus de droit à l’erreur, ni à la réflexion, nous devrions au plus vite émettre une opinion. Les bulles informationnelles polariseraient les derniers rationnels, transformant chaque discussion en confrontations, toujours plus violentes. Dans un tel contexte, quel sens prendrait le mot démocratie?  

Demain, c’est peut-être loin, mais toujours à portée de la volonté de chaque citoyen. Parce qu’en fin de compte, c’est à chacun d’entre nous d’imaginer, de rêver et enfin de se mobiliser, ensemble, pour construire une société à la hauteur de nos ambitions.